Summon/arpente_lieux est un rite mémoriel documenté, l’installation est constituée de deux espaces d’où émanent un ensemble de talismans, de sceaux et de charmes qui sanctifient la zone du souvenir. Dans ces espaces j’ai joué, j’ai construit ma cabane, j’ai vécu ici. Alors en témoignage de ces instants passés, ces fragments véhiculent un ensemble de codes et de connotations qui s’articulent à la nature du lieu. Le décryptage de ces signes est alors un moteur nostalgique, une structure qui se souvient et qui nous pousse à chercher ce que l’on a perdu là bas, dans les limbes de l’enfance. Le série de photographie constitue une pseudo-documentation de ces lieux : elle oriente grâce aux procédés dont elle dispose et revendique une subjectivité inévitable. Luminosité et éclairage, angles de prise de vue et sujets sont vus par un prisme suggestif, une mise en avant d’accents précis, de champs lexicaux qui déploient une trame narrative.
Plusieurs endroits en un, celui du souvenir. Le jardin, le parking des chasseurs, la traversée feuillue, les palettes, le trou, la place, le cabanon en tôle. Le croisement des symboles, la forêt et la culture, le rhizome et le réseau. Les jeux, les images et les pas qui foulent le sentier. Des objets totems, des fragments folkloriques et technologiques, une croyance obscure faite d’autels bricolés, de babioles qui brillent, de signes ambivalents qui tracent la route à arpenter. Par ces checkpoints, ces zones denses de signes qui s’opposent, se complètent : mon souvenir de leurs lieux, ce qui me touche et ce que j’ai habité ou traversé, ce que j’ai effleuré.
La branche qui s’accroche au blouson, qui en écarte le maillage, mais dont l’extrémité se casse sur mon passage. Nous devenons balade. Un processus d’avancement qui sème, qui récolte. Les baies et les cartes, les branches et les chaînes, les champignons et les dessins. Ce sont là des autels qui s’animent dans une structure de renvoi, un point de paradoxe qui dénote avec l’autour mais qui l’assimile, qui assume la trace laissée dans les pas, la plante écrasée mais ramassée aussitôt, l’insecte extrait qui ne se décomposera pas, il fait partie intégrante de l’autel maintenant. Il faut suivre ces balises, capter leur aura, leurs reflets, à travers ces denses broussailles ou ces marches de pierres en surbrillance qui chuchotent : « c’est par ici ». Marcher dans les pas de ceux qui ont façonné le chemin, mais y trouver aussi le sien : « tiens, je vais prendre par là, qu’est-ce qu’il y a par là ? ».
Là ou il y a des gens, il y avait la forêt. Et son récent débroussaillage laisse apparaître leurs autels, les vestiges de leurs rites. Constituer les campements qui racontent par leur matière, ce qu’elle dit, ce que l’on comprend. Reconnaître un signe ici qui se retrouve là, juste à côté de cette autre symbolique, parasitage mémoriel. Un langage pluriel se déploie dans le lieux, fait de phrases, de morphologie, de champs d’images propres et autonomes qui dialoguent ici. Mais il n’y a pas de points, seule une infinité de tirets, de citations et d’emprunts se déroule. Chaque syllabe renvoie à l’autre, n’importe quelle autre bribe de l’assemblage graphonétique. Ce qui était dans le champ périphérique se retrouve au milieu, sous-ligné, placé ici entre guillemets. Au milieux de ces bois qui racontent et se nourrissent de ce qui se raconte ailleurs.
























