L’exposition Tales of Carbanion est un phénomène à explorer. Elle consiste en deux temps
succincts qui se matérialisent en un rituel expographique ouvert durant toute sa composition. Le montage évolutif relève d’une temporalité et d’un processus éphémère. 
Un premier lieu : La Carrière, dans cet espace, la composition empirique se lie à la structure et fait émaner de l’architecture de l’espace des éléments magiques, sortes de manifestations qui permettent de localiser, agencer et moduler les éléments narratifs de l’endroit. Là où Navidson est passé, les empreintes de ses pas laissent un dépôt dont l’éclosion changera la
nature du sol. 
À chaque fin du cycle l’espace d’exposition sera cristallisé, le résultat d’une
composition spatiale qui s’est étendue sur plusieurs jours en amont. La Carrière est un lieu qui systématise le rituel, ce moment où le corps se prolonge dans l’objet (totems, talismans,...) pour accéder au monde. L’humain crée un artefact issu de ressources naturelles et lui donne un sens, il transforme ce matériau en outil. Ce qui, à son tour, transforme un espace en lieu transcendantal d’accès à la nature. Des cultures païennes mégalithiques aux civilisations polythéistes et monothéistes qui suivront, le centre du village est ce lieu, et tout s’organise par rapport au point sacré. Ici l’on intervient dans l’espace de sorte à raisonner avec le lieu, de transformer son architecture en place centrale où dialoguent des témoins. Le phénomène qui se produit est par définition vu, c’est une expérience d’un rapport au monde.
Cette expérience de l’espace se traduit alors dans l’histoire, la fable ou encore le mythe.
Le recours à la fiction spéculative permet d’interroger l’acte schizophrénique et de comprendre le monde. Poésie et science se confondent lorsqu’il s’agit de s’expliquer le phénomène naturel. Comme se demandait Ursula K. Le Guin, « pourquoi les Américains ont-ils peur des dragons ?» Pourquoi cet évitement de l’imaginaire est-il si prépondérant dans
un rapport au monde contemporain ? Et surtout, qu’est-ce que cela implique dans l’invocation de nouvelles histoires ?